Clé USB personnelle et mode de preuve illicite

18 Nov 2024 | Droit du travail

Les faits

Une salariée, assistante commerciale, ayant 37 ans d’ancienneté, est licenciée pour faute grave : son employeur a trouvé sur son bureau, plusieurs clés USB, dans lesquelles figuraient de nombreux fichiers confidentiels de l’entreprise, dont certains relatifs à des données de fabrication, auxquels elle n’avait pas accès dans le cadre de ses fonctions.

Elle conteste principalement la licéité du contrôle de l’employeur sur le contenu de ces clés USB personnelles : ce dernier prétendait qu’elles se trouvaient dans le bureau de la salariée, certes non connectées à l’ordinateur professionnel, même si elles avaient pu l’être par le passé.

L’employeur démontrait qu’il existait des raisons concrètes qui justifiaient le contrôle effectué sur les clés USB de cette salariée, au regard de son comportement : selon le témoignage de deux de ses collègues, elle avait travaillé sur le poste informatique d’une collègue absente et imprimé de nombreux documents qu’elle avait ensuite rangés dans un sac plastique, placé soit au pied de son bureau, soit dans une armoire métallique fermée.

Question ?

L’employeur pouvait-il utiliser la découverte de fichiers confidentiels de l’entreprise sur les clés USB personnelles de la salariée pour justifier son licenciement pour faute grave ?

Réponse

OUI

L’accès par l’employeur, hors la présence du salarié, aux fichiers contenus dans des clés USB personnelles, qui ne sont pas connectées à l’ordinateur professionnel, constitue une atteinte à la vie privée du salarié, de sorte que les preuves tirées de leur exploitation présentent un caractère illicite.

Il résulte des articles 6 et 8 de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales, 9 du code civil et 9 du code de procédure civile, que dans un procès civil, l’illicéité ou la déloyauté dans l’obtention ou la production d’un moyen de preuve ne conduit pas nécessairement à l’écarter des débats.

Le juge doit, lorsque cela lui est demandé, apprécier si une telle preuve porte une atteinte au caractère équitable de la procédure dans son ensemble, en mettant en balance le droit à la preuve et les droits antinomiques en présence, le droit à la preuve pouvant justifier la production d’éléments portant atteinte à d’autres droits à condition que cette production soit indispensable à son exercice et que l’atteinte soit strictement proportionnée au but poursuivi.

Articles visés

Article L. 1121-1 du code du travail
Articles 6 du code civil et 9 du code de procédure civile
Articles 6 et 8 de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales

Principe juridique en cause

Un mode de preuve illicite peut être utilisé si cette preuve est indispensable à l’exercice du droit à la preuve et strictement proportionnée au but poursuivi.

Arrêt

Cass. soc., 25 sept. 2024, n° 23-13.992

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